Les agrocarburants ne sont pas bio
Ca y est ! On commence enfin à changer de vocable. Suite aux parutions
récentes de livres critiques sur « l'or vert », et suite aux
polémiques qui ont suivi, remettant en cause le bien-fondé de l'intérêt
croissant porté aux agrocarburants, le mot « biocaburant » commence à être remplacé par
« agrocarburant ». A juste titre, car ces
agrocarburants n'ont rien de bio (ou si peu). Alors que certains pays comme les
Etats-Unis ou le Brésil y voient un moyen de se rapprocher d'une hypothétique
indépendance énergétique, de nombreuses voix s'élèvent contre le « péril
vert ». D'une part, l'essentiel de la production d'agrocarburants provient
d'une agriculture intensive, gourmande en engrais chimiques, pesticides et
autres insecticides. Tout le contraire d'un produit issu de l'agiculture
biologique. De plus, les impacts sociaux et environnementaux sont bien plus
vastes : au Brésil, les petits paysans perdent leurs terres, notamment au
profit des grands industriels des agrocarburants, en Asie du Sud-Est, ce sont
des millions d'hectares de forêts qui sont défrichées pour la culture du
palmier à huile. Enfin, le développement des agrocarburants met en danger la
souveraineté alimentaire de certains pays, où les cultures dédiées aux
agrocarburant risquent de prendre le pas sur celles dédiées à l'alimentation
humaine. Avec le problème suivant : doit-on sacrifier à l'appétit de 800
millions d'automobiles les 3 milliards de personnes pour qui l'agriculture est
avant tout vivrière ? Alors que la population mondiale se situera autour de 9
milliards d'humains en 2050 et que se pose la question de la capacité de la
Terre à nourrir tout le monde, destiner une partie de la production agricole à
l'usage de carburant n'est pas sans poser de questions. Si leur bilan carbone
est moindre que l'or noir, leurs impacts sociaux et environnementaux ne sont
pas idéaux, et c'est un euphémisme. Certains en viennent même à parler de
« nécro-carburants ». On le voit, les agrocarburants ne sont pas LA
solution à la fin programmée du pétrole. Tout au plus peuvent-ils devenir une
composante du futur « mix énergétique » mondial, au même titre que
l'hydraulique, l'éolien ou le solaire.